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samedi, décembre 01, 2007

Le "TGC" (16 au 20 juillet 2007)...

Du refuge du Grand Bec (2460 m) au refuge du Laisonnay (1560 m) par la Brèche de la Grande Marianne...

 
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 Mercredi 18 juillet: Il fait jour depuis peu de temps et je suis déjà debout pour aller voir la couleur du ciel dans la troisième chambre qui a une porte-fenêtre ouvrant sur la terrasse de l'arrière. Bien sûr, il est trop tôt pour se lever et se préparer mais maintenant je sais. Il fait "grand beau" comme ils disent dans cette région et sauf changement exceptionnellement rapide de la météo, je sais, je sais que la brèche c'est pour aujourd'hui et pour nous. Sans bruit, je retourne me coucher sans aucun espoir de me rendormir et j'attends patiemment qu'il soit l'heure de se lever vraiment pour réellement se préparer.
 7h: P'tit dèj, il est copieux avec des céréales
, du jus de fruits etc. Comme tous les soirs, on nous a demandé hier ce que nous prenions comme boisson chaude (ça évite le gaspillage et surtout on perd moins de temps). C'est drôle, pendant le repas on parle peu de ce que vous savez, parce tout le monde sait. Même moi je sais, comme disait Gabin dans sa chanson. Tiens, Sylvie est allé voir le petit poteau indicateur qui est situé légèrement en contre-bas du refuge au départ de l'itinéraire Bis. Je sais maintenant ce qui y est écrit. A présent, on le connait presque par coeur le parcours, notre jeune couple nous en ayant parlé hier avec moult détails même qu'à un endroit, il faudra se diriger vers le nord parce la trace n'est pas nette.
Je suis prêt dehors le premier et j'en profite pour faire quelques photos de ce paysage qui change avec la luminosité croissante du soleil. Mon sac est bouclé et posé sur une des tables de l'extérieur. Nos jeunes amis d'un soir sont prêts à partir, madame avant monsieur. Petit à petit, ils disparaissent sur le chemin sur lequel nous sommes arrivés et nous savons que nous allons les revoir car ils font le tour de la Grande Casse dans l'autre sens et donc nous devrions nous rencontrer à nouveau lors de notre dernière étape, du côté du col de la Leisse après Tignes. Sylvie arrive en disant: "Je crois que je suis attendue, j'suis un peu à la bourre non?".
 Après avoir salué nos hôtes, nous descendons légèrement en direction de la bifurcation où il y a le poteau directionnel. C'est bien écrit ce que je connaissais déjà. Le chemin est étroit mais peu pentu et c'est évident quand on voit l 'herbe qui pousse au milieu de la trace, il n'est pas très utilisé. On monte progressivement en corniche, il y a quand même un peu "d'air" par moment. La progression se fait par à- coup.Petit à petit, nous arrivons dans un immense cône d'éboulis composé d'énormes pierres dans lequel nous perdons plusieurs fois la trace. Les cairns ne sont pas évidents à repérer tant et si bien que même en faisant du "nord" en traversant ce secteur, on se retrouve trop haut au moment où, avec Sylvie, nous repérons à nouveau le sentier qui part du pied de la "falaise". Ce dernier passage était très agréable car son franchissement nous laissait une liberté totale d'improvisation et le cadre était une nouvelle fois magnifique.
En rega
rdant le début du passage en lacets, je n'en mesure pas trop sa difficulté mis à part le fait qu'il est bien pentu ce que, d'habitude, j'affectionne particulièrement. C'est dans un premier temps, son étroitesse qui me pose problème plus que la raideur de son profil. Ensuite, c'est le "gaz" qu'il y a sur le côté à chaque fois que je passe d'un lacet à l'autre, et pour terminer, c'est la hauteur de la "marche" à chaque virage où je suis parfois obligé de "m'accrocher" à la montagne à "tout ce qui tient, même les herbes, c'est plus solide que la roche qui est friable". Merci, Sylvie!
La fin du parcours arrive comme une progression quasi exponentielle. Chaque "virage" est plus dur et plus abrupt que le précédent. J'ai le souffle court et Sylvie a déjà compris que ce n'est pas la fatigue mais la peur. Celle-ci arrive alors que nous sommes sur une espèce de petit éperon où on ne tient pas à deux, juste avant d'attaquer la section finale équipée avec des chaines. C'est à cet endroit précis que nous remettons nostons sur le sac. "Mais pourquoi "il"n'a pas mis une chaine là le guide ?". C'est bizarre, mais à cet instant, je pense au passage de la fameuse écaille dans la "via ferrata" d'Aussois l'an passé, vous savez la fameuse "montée au ciel". Je me suis dis :"ça passe ou ça passe pas, mais t'as pas le choix, il faut y aller". Sylvie est hyper-présente à cet instant. Je le sais et ça me "booste". "ça y est, j'ai la chaine dans la main!". Une première victoire parce que pour aller de l'éperon jusqu'au début de la chaine, c'était pas évident sans les bâtons.
Sylvie est partie en a
vant sur la première section et j'attends qu'elle me dise d'y aller parce qu'elle ne veut pas qu'on soit deux sur le même intervalle. "Sécurité, sécurité, ici le Cross Corsen qui diffuse un bulletin météo pour la journée du........"
"Hé, qu'est-ce t'attend le
Cross?". "Y'a un petit marin breton en perdition là-haut et t'as même pas diffusé un avis de "grand-frais"! "C'est quoi c'boulot!".....Et d'une!



"Y'en a combien des portions de chaine ? Je ne vois pas encore la sortie........Et de deux! J'ai la casquette sur la tête qui m'empêche de voir plus haut et puis, même si je le voulais, je ne pourrais car le fait de mettre ma tête en arrière me fiche la trouille, donc je regarde où je mets mes pieds et mes mains. Bref, je suis en "survie", mais je sais que ça ne va pas durer. Je viens d'entendre Sylvie me dire:"Allez, Jean-Charles, c'est la dernière.....!"
Un pied, une main puis l'autre, puis l'autre pied, puis l'autre main.....En haut, Sylvie n'est plus là pendant que je fais mon dernier effort, elle a basculé un peu de l'autre côté. Au milieu de cette dernière longueur, j'avais eu le courage ou pris le risque de lever une seconde la tête et je l'avais aperçue en haut, en contre-jour, sur le ciel bleu dans la faille. "Je crois même que tu étais en train de prendre des photos". En plus dans ce geste, je suis sûr que tu le faisais pour que je puisse avoir un témoignage de cet instant. "Tu vois Sylvie, je te parle dans ce blog parce que, il faut bien le dire, il t'est un peu dédié ce blog!" Sachant que la partie était gagnée, tu m'as laissé finir tout seul, comme un grand, pour que je savoure ce moment encore plus. C'est ça, la classe!



En haut, c'est en haut, et.... c'est le grand vide dans ma tête. Je crois qu'on s'est dit quelque chose mais je ne sais plus quoi. Tout ce dont je me souviens, c'est que tu étais assise, ton sac à tes côtés et puis sans rien dire, j'ai posé le mien en te tournant le dos, car un flot de larmes était en train de m'envahir, je me suis agenouillé et j'ai pleuré........."Allez, Jean-Charles, respire bien et ça va aller!"Je suis resté quelques instants "off", replié sur cette peur rétrospective et aussi cette joie immense d'être en haut. "La montagne, ça vous gagne!", qu'ils disent, oui mais, celle-là elle vous prend les tripes, elle vous fait vous "dépasser", elle vous permet de vivre des moments inoubliables...Et celui-ci en était un.
Le névé, en contre-bas de l'autre côté est irréel tellement il est beau. Je le découvre en séchant mes joues et la joie d'être là devient immense et profonde. Devant nous, un panorama splendide avec même en arrière-plan le massif du Mont-Blanc qui a coiffé son "âne" et en bas après le névé la brèche de Marianne que nous devons franchir après en avoir fini avec le névé. A partir de cet instant, 1400 m de dénivelé nous attendent jusqu'à la vallée du Doron de Champagny.
Le passage du névé se fait sans problème: "Bien enfoncer le talon en premier pour éviter la glissade et de se retrouver la tête en vrac sur la première roche venue. A cet instant, j'ai l'impression d'être dans "Tintin au Tibet", c'est drôle, mais j'y ai pensé. Pourquoi? Je me sens léger, un peu comme le capitaine Haddock quand il part en tête de l'expédition après avoir bu un petit coup de son fameux whisky.Tout de suite après le névé, nous empruntons la crête d'une ancienne moraine qui nous amène tout droit vers la brèche de Marianne. J'ai tendance à sortir du chemin à cet endroit en étant un peu trop sur le bord. Que voulez-vous, je m'enhardis, mais mon guide a vite fait de me ramener sur le vrai tracé.
C'est justement à cet instant
, en quittant la neige, que je m'aperçois que quelque chose ne va pas au niveau de ma chaussure droite. En y regardant de plus près, je constate qu'elle est ouverte sur au moins cinq bons centimètres à l'intérieur entre la semelle et le dessus, mais heureusement la "blessure" n'est que superficielle. Fâcheux, mais j'ai dans mon sac deux sangles que notre amie Marie-Jo m'avait prêtées l'an passé, quand j'avais eu des problèmes, dès le premier jour, avec les bretelles de mon sac à dos. Un petit bricolo à la Mc Gyver et le tour est joué, me voilà équipé de chaussures à sangles hi-tech et surtout du dernier cri. Pourquoi je dis hi-tech, parce que je m'aperçois qu'en descendant mon pied ne vient plus s'appuyer sur l'avant de la chaussure et donc ça ne me fait plus mal, ce petit problème se transforme en solution providentielle pour les futures descentes......Je vous dis, le bonheur! Bien sûr, ma camarade de rando ne manque pas d'immortaliser l'évènement. Le passage de la deuxième brèche se fait sans difficulté majeure avec cependant un léger guidage de mon coach et au bout de d'une heure, nous nous retrouvons au bord d'un petit lac au-dessus du refuge du Plan des Gouilles à 2352 m. Il ne nous reste plus que 900 m de dénivelé à faire....Un détail avec mes chaussures révolutionnaires....
C'est à partir de ce lac que nous reperdons la trace du chemin que nous rattraperons un peu plus bas en franchissant un superbe petit torrent bien vigoureux. A partir du refuge, commence une longue descente en lacets qui va nous amener progressivement en-dessous des 2000 m au couvert d'une belle forêt dans laquelle nous trouvons un superbe endroit pour notre halte-repas.
Bien à l'ombre, avec deux"assises"en vis-à-vis, c'est inespéré. Quelques dizaines de minutes plus tard, nous nous retrouvons en bas dans la vallée du Doron à Champagny-le-Haut. Drôle d'impression que de passer si rapidement d'un endroit sauvage et quasi désert en altitude, à un parking de voitures à proximité d'un village avec un peu de monde partout. Il nous faut traverser le torrent pour atteindre le bourg afin d'y ravitailler en eau car nous n'avons plus grand-chose à boire et Sylvie me dit qu'il doit y avoir sûrement une fontaine qui nous attend sur la place du village. Et elle a raison, nous la trouvons effectivement sur une petite place à la sortie sur la route de notre objectif. On mélange le peu d'eau qui nous reste avec celle-ci qui est très fraiche pour ne pas boire trop froid. Nous quittons Champagny-le-Haut avec regrets car ce village est superbe et très animé. Nous commençons notre remontée vers le refuge en longeant le doron. Il nous reste 200 m de dénivelé à faire et quelques 4 ou 5 kms à parcourir: Une plaisanterie!
Ce dernier tronçon es
t très agréable car nous pouvons marcher l'un à côté de l'autre pour la première fois depuis le début de notre périple et donc discuter tout en avançant. Assez vite, nous atteignons le petit village de Friburge à partir duquel un nouvel itinéraire a été aménagé. Sylvie prend beaucoup de photos de fleurs, c'est vrai qu'on est gâté, une telle variété, bref on "herborise" à tout-va. A la sortie de Friburge où il y a une exposition de l'artisanat local, nous empruntons une centaine de mètres seulement la route, puis nous trouvons le nouveau parcours au bout d'un parking comme on nous l'avait expliqué auparavant. Nous nous retrouvons à nouveau le long du Doron, mais cette fois-ci sur sa rive gauche. Un fléchage bis nous permet d'éviter une zone apicole (c'est mieux comme ça, parce que ces petites bêtes peuvent avoir mauvais caractère si on les dérange.) En arrière-plan, on commence à apercevoir la paroi nord de la Grande Casse et dans le fond, on devine les contre-forts de la Grande Motte. Comme vous le voyez, on tourne autour et bientôt nous pourrons contempler l'ensemble de ces deux superbes sommets alpins. Sûrement ce soir à notre arrivée au refuge du Laisonnay. Nous passons le Laisonnay-d'en-Bas, en fait , c'est un grand parking où les randonneurs peuvent laisser leur véhicule. Une route goudronnée interdite à la circulation nous mène jusqu'au refuge. Une immense cascade apparait sur notre gauche. Légèrement en contre-bas sur notre droite, il est là posé dans un magnifique écrin de verdure avec ses petits parasols multicolores en terrasse. L'endroit est insolite mais très convivial, on se croirait en "vacances". L'accueil est des plus sympathiques mais avant tout, un rituel s'impose: Celui de notre bière de l'arrivée que nous prendrons en terrasse après avoir déposé nos sacs à l'intérieur du dortoir. Bonheur, quand tu nous tiens...Le Refuge du Laisonnay est au pied de la cascade et le bruit est envoûtant. Plusieurs bâtiments le composent mais celui dans lequel nous allons dormir est superbe d'authenticité, un bijou et en plus, il vient d'être rénové intérieurement. Aucune surprise donc avec des sanitaires grand confort et des douches accessibles sans supplément de prix....Tout est propre et même coquet. Nous partagerons le dortoir avec une grande famille de dix personnes et semble-t-il un couple de randonneurs que nous n'avons pas encore vus, car dehors il y a encore plein de monde mais les gens qui viennent ici pour la journée, s'en vont au fur et à mesure que l'heure avance. Il va être l'heure d'aller se prendre une bonne douche. En entrant dans le dortoir, je constate que le lit superposé du bas-flanc d'en face est occupé et qu'une bonne récupération est en route. Chut donc et en route pour la douche....Humm! Quel plaisir de se requinquer après plusieurs heures de marche et surtout quelques émotions un peu vives. Quand je rejoins Sylvie qui remplit de son journal de bord à l'abri d'un parasol parce qu'il fait encore très chaud, je me sens un homme neuf. Dans la foulée, j'entreprends même une petite lessive.



"Tiens, c'est la famille de dix qui arrive.."Trois mamies, deux mamans et des jeunes . Nous espérons qu'ils sauront se tenir à l'heure du coucher. Je vous rassure tout de suite, exemplaires! Il est maintenant l'heure du repas, l'ombre est maintenant tombée sur le refuge et nous sommes conviés à prendre notre diner sur une table de quatre. Soirée à la bougie, parce qu'on économise l'énergie ici et c'est bien agréable. Nous faisons connaissance avec nos voisins de bas-flancs. Elle est néo-zélandaise et lui irlandais. Ils ont une trentaine d'années, sont mariés et bougrement sympathiques. Tout au long de la soirée, nous discuterons moitié en français et moitié en anglais. Ah, les voyages....!
Le menu?: Un délicieux potage suivi de
paupiettes accompagnées de crozets et exceptionnellement ce soir avec un quart de vin gamay, ensuite, fromages et dessert. Nous n'avons pas l'intention de trainer trop ce soir car demain, un fort dénivelé nous attend. Le soleil se couche en se nichant dans le V de la vallée. Lorsque je monte me coucher, Sylvie est déjà en pleine lecture....

Alors, bonne nuit et à demain pour de nouvelles....aventures!












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