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samedi, décembre 01, 2007

Iles Scilly du 13 au 25 juillet 2008: Helford River - Penzance




SIXIEME JOUR: HELFORD RIVER - PENZANCE


Vendredi 18 juillet : Il est un peu plus de 6h. J'aime bien me lever tôt le matin. Je suis tout seul dans la petite cabine de coursive et donc, je ne réveille personne prématurément. Je sais que le soleil se lève pratiquement dans l'axe de la rivre et donc, s'il y a une photo à faire, il ne faut pas manquer cet instant. Eh bien, ce matin, je l'ai manqué d'un cheveu...Je m'en veux car je suis sorti sans mon appareil, mais j'ai pu obtenir celle-là, avec un peu de retard...




Aucun bruit à part les cris bien agréables de quelques goélands argentés qui eux sont réveillés depuis au moins une heure. C'est le moment de faire un petit 360°.....




Bel endroit, cette rivière! Le plafond de nuages est très bas, ça ressemble étrangement à des stratus ou plus communément du brouillard comme il en existe fréquemment dans le coin. Je m'occupe un peu en préparation à la table à cartes en attendant le réveil de mes équipiers. Une petite demi-heure plus tard, c'est le tour de Dominique, puis c'est celui d'Edith et enfin Hélène et Jean-Pierre. Petits tours d'horizon sur le pont, j'annonce que le départ se fera vers 8h, une heure pour sortir et trois petites heures pour arriver au Lizard. Un petit déjeuner solide et toujours aussi plaisant à vivre et chacun, après une petite toilette de "chat", se prépare et s'habille en fonction de ces nouvelles conditions.
 A 8h15, la pointe sur le coffre est larguée et nous descendons lentement la rivière au moteur en préparant l'envoi de la grand'voile comme d'habitude. Ensuite, on descend pratiquement au vent arrière. Les rives sont noyées dans un épais brouillard, quelle ambiance ! On se croirait dans un de ces films fantasmagoriques un peu glauques des années 30. A la sortie, on lofe un peu vers le premier waypoint en déroulant tout le génois. Notre objectif est la cardinale Est des Manacles distante de moins de 4 milles. 50 minutes plus tard, on incurve notre route en lofant de presque 90° vers Black Head la dernière pointe avant le Lizard. Nous ne sommes pas seuls dans cette purée de pois. Un autre voilier qui vient du Nord croise notre route et semble aller lui aussi vers le Lizard. Nous sommes maintenant dans son sillage à un demi-mille. La visibilité vers la terre est très réduite et on se demande ce qu'on verra de notre cap dans deux heures. On rattrape petit à petit le voilier qui a croisé notre route, on est tribord amures.
" Jean-Charles, le génois est déchiré et je crois bien que ça s'aggrave..." me dit Edith tout laconiquement car cette dame n'est pas du genre à dramatiser. C'est vrai, la voile est au moins déchirée sur 30 bons centimètres et c'est sur la couture d'une laize. Période d'observation de 10mn et pendant celles-ci, la déchirure passe de 30 à 50cm: Il est temps de faire quelque chose. Nous avons tout ce qu'il faut à bord pour réparer mais il faut affaler et la seule voile que nous ayons pour l'instant à envoyer à la place du génois, c'est un tourmentin bien plat et bien raide, alors que dans ce clapot naissant, il nous faudrait de la puissance. Procédons par ordre: D'abord affaler le génois et le mettre dans le carré. C'est dans ces circonstances que vous voyez quel genre d'équipage vous avez: Eh bien, celui-là est vraiment à la hauteur et en quelques minutes le génois est dans le carré et le tourmentin "endraillé" et prêt à être envoyer. Bravo à toutes et tous pour ce travail efficace ! Moins de 15mn après la découverte de la déchirure, nous avons les deux voiles à poste mais on manque sérieusement de puissance aussi, je décide de mettre un peu de moteur pour nous aider un peu. Si je comprends bien, je vais passer le Lizard en faisant des travaux de couture? Dans ce cas, il faut attaquer tout de suite car il y aura besoin de 2 faufilages, un de chaque côté de la voile pour que la réparation soit efficace. " Allez, au boulot Jean-Charles ! "...Je suis très vite obligé de "tomber la veste" car ce travail donne un peu chaud sans compter quelques petites sensations de remontées stomacales dues au fait qu'elle a peut-être un peu faim, la p'tite main....Avec l'aide initiale d'Edith, les choses avancent bien et la première ligne est faite en 1 heure. Et pendant ce temps-là, ils naviguent eux, ils passent tous seuls LEUR cap Lizard et se débrouillent magnifiquement bien, prennent des photos et usent de stratégies pour les virements. Il parait même qu'il y avait un magnifique paquebot qui croisait dans les parages. Pas vu, mais eux,si....Ils ont même réussi, après avoir repéré la fréquence du phare à le photographier en phase d'allumage sur son éclat. Pas mal, hein ! Je ne sais plus combien nous avons fait de virements mais quand le travail a été terminé, quel soulagement et en plus, je voyais bien que ça allait tenir, c'était du solide. Deux heures vingt cinq après le début de l'atelier couture, le génois refait son apparition sur le pont, opérationnel à nouveau. Jean-Pierre en est hilare. Il ne nous reste plus qu'à faire l'inverse de tout à l'heure. Au travail, et là aussi ça va vite, même très vite. Moins de 3h après la découverte de la déchirure, la voile blessée et réparée est à nouveau à poste, le moteur est coupé, nous sommes en route directe pour Penzance à 6,5nds et .....on est heureux ! "Chadburn" est reparti de plus belle et la réparation tient bien. A présent, il nous reste une quinzaine de milles à faire au 315°, une plaisanterie à côté de ce qu'on vient de faire. Dans moins de deux heures, on sera sur une des bouées d'attente devant la jetée du port de Penzance. Une petite faim ? Un petit grignotage se met en place. Il est 12h40, comme disait mon grand-père, le café est bas. A partir de cet instant, cette croisière a pris une autre tournure. Nous étions tous heureux pour les mêmes choses, pour tout ce que nous venions de réussir collectivement et chacun en fonction de ses possibilités. Cela se voyait dans leur regard et cela s'entendait dans les conversations. Le bonheur régnait en maitre sur ce bateau. J'ai nettement senti à cet instant qu'ON avait réussi quelque chose de bien.

On a perdu notre compagnon de route dans tout ça. Et avec la visibilité qu'on a, on ne risque pas de le retrouver. On s'enfonce progressivement dans la baie de Penzance. Nous laissons les derniers dangers du cap sur tribord. Dans un peu plus d'une heure et demie, nous devrions apercevoir le fameux Mont-St-Michel anglais qui est situé à quelques milles dans l'est de Penzance. Vers 13h30, on aperçoit sur tribord la silhouette caractéristique de cet "ersatz" de Mont-St-Michel et la bouée cardinale sud qui signale un haut-fond dans son sud-ouest. Pendant un instant, on a envisagé d'aller faire un mouillage près de ce mont en attendant l'ouverture de la porte du bassin à flot de Penzance, mais au vu de cette météo radieuse, on y a renoncé sans regrets d'ailleurs. 30mn plus tard, on voit de plus en plus nettement la jetée du port et les amers qui vont faciliter notre arrivée. Le temps se dégage petit à petit, le brouillard disparait et le repérage de notre mouillage d'attente n'est qu'une formalité. Quelques bouées sont déjà occupées et il en reste suffisamment pour qu'on fasse notre choix. A 14h25, notre aussière est frappée en double sur un corps-mort d'attente, il ne reste plus qu'à ......attendre un peu plus de deux heures que les trois feux verts s'allument sur le mat sémaphore que nous voyons juste au-dessus de la jetée. On va peut-être manger, après tout. Toutes ces émotions nous ont mis en appétit. " Allez, à table!" Ah, j'allais oublier: Aujourd'hui, c'est l'anniversaire d'Hélène.
Happy birthday, Hélène, en attendant de le fêter de façon un peu plus "officielle" ce soir au port ou ailleurs.
17h05: Les 3 feux verts sont allumés et il tarde à cet équipage d'aller voir comment c'est ce port de Penzance. Mise en marche du moteur et à larguer la pointe avant, on contourne la jetée, on est devant les autres bateaux. On avance tranquillement vers la passe de l'écluse, un autre feu vert nous autorise à le faire, nous sommes à moins de cinquante mètres de l'entrée quand.....On en croit pas nos yeux !! L'horizon de notre terre promise se bouche sous la forme d'un énorme cargo qui sort au chausse-pied. Le harbour-master court sur le quai et nous crie de faire demi-tour ce que nous faisons illico-presto, ne voulant lutter, malgré notre évidente autorisation à entrer, avec les tonnes d'acier qui se présentent devant nous. Chaude ! Très chaude, cette entrée ! Bien sûr qu'on fait demi-tour car il lui faut de la place pour sortir à ce mastodonte. On repasse le prolongement de la jetée dans l'autre sens persuadés qu'il y a une partie de l'épisode qu'on a pas bien comprise. Enfin, regardez et agrandissez cette photo en cliquant dessus, on voit nettement les 3 feux verts du mat-sémaphore plus le vert de l'écluse.
"Sorry", dira un peu plus tard le harbour-master. Sortie sans probl
ème du cargo, ça dégage "sec" devant, vous pensez !!!
A notre deuxième tentative d'entrée, on laisse un bateau anglais passer devant nous dans le style: "Messieurs les anglais, tirez les premiers" et on entre avec une extrême prudence dans le genre:"On ne nous refera pas deux fois Fachoda "."Non mais, sans blague ! " comme dirait notre regretté Coluche. Cette fois-ci, Dominique se poste en figure de proue. Cool, mais vigilant...
"Good afternoon ! Just for one night, please."
" You wait please..." En attendant qu'on nous dise où on va aller et comment, nous avons le temps de regarder autour de nous: Tout de même, ce port est unique avec cet amalgame de bateaux de toutes tailles, de tous âges de toutes catégories, du bateau de pêche en passant par le vieux gréement sans oublier les épaves flottantes qui sont là depuis tant d'années. Finalement, on nous donne le "feu vert" pour se mettre à couple dans la partie droite du port. Ainsi, nous pourrons nous brancher électriquement au quai et faire un complément d'eau dans les tanks avant les Scilly car là-bas, c'est un peu plus compliqué et l'eau y est rare, donc facturée. La mise à couple se fait en utilisant le pas d'hélice. Les "pointes" sont tendues, les "gardes" sont ajustées et les "pointes au quai" seront frappées un peu plus tard. Rangement, aération du bateau pour sécher l'intérieur, branchement en cours.....ça y est, on est arrivé. On va pouvoir penser un peu à nous et à découvrir cet endroit qui mérite une halte avant la traversée pour les Scilly. Il y a aussi Newlyn à moins de 2 milles qui est un port à flot (on peut y entrer ou en sortir à n'importe quelle heure de marée), mais j'ai appris un peu plus tard qu'il y avait, parfois, une cohabitation difficile avec les pêcheurs professionnels.
A bord, le téléphone d'Hélène commence à chauffer au rouge, que voulez-vous on a pas tous les jours "vingt" ans !!!. On sait tout maintenant pour les douches etc.... et on décide d'aller faire un petit tour à terre, histoire de voir à quoi ça ressemble un port du bout du monde. Le centre-ville est organisé par rapport à deux rues principales qui descendent des hauteurs. On ne manquera pas non plus de se promener dans les très beaux parcs ouverts au public. Nous terminons notre exploration dans un immense pub où nous prenons un pot pour fêter le birthday d'Hélène. Un léger crachin normal pour la région, nous cueille à la sortie et vu l'heure tardive, on décide de s'offrir un repas "fish and chips" que nous consommerons à bord de notre bateau bien à l'abri et bien au chaud. Après le repas au cours duquel nous avons un peu fêté l'anniversaire d'Hélène, on étudie une projection de route avec Dominique en tenant compte des prévisions météo: "Westerly 4-5 with gusts to 6 ". A Land's End, ça risque de secouer un peu... Par contre, ils nous annoncent du beau temps ensoleillé. Pourvu que..... Il nous faudrait une petite dizaine d'heures pour rallier Hugh Town, le port principal des Iles Scilly avec du vent d'ouest qui serait une situation "acceptable". Jean- Pierre de son côté, se saisit du pilote côtier et compte bien en connaitre les moindres détails pour notre atterrage. Entre la bouée cardinale Sud de Runnelstone et St-Mary's, il y a 26 milles au 253°. Deux bords avec un premier très long au 210° à peu près et un deuxième plus court au 320-330°.
La soirée est bien entamée quand nous allons " mettre nos yeux à dormir", car demain matin, il faudra sortir du bassin avant 7h30 heure locale.... Et demain, c'est quoi Dominique....?
"Les Scilly, pardi !". Depuis le temps qu'ils en rêvent avec Edith.....
Bonne nuit à toutes et à tous ! Si on pouvait avoir du noroît ??


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