DOUZIEME JOUR : PLOUMANAC'H - SAINT-QUAY PORTRIEUX via ILE DE BREHAT
En Bretagne Nord, quand on fait escale dans un port avec un bassin en haut profonde, soit c'est un bassin à seuil et dans ce cas on peut en sortir le lendemain quand on a assez d'eau au-dessus, ou bien c'est une éclus
e et là, on est tributaire des horaires d'ouverture du sas. Dans le premier cas, en fonction des coefficients, on a souvent au moins quatre bonnes heures de courant favorable une fois dehors. Donc, ce matin, il ne faut pas qu'on traine trop si on veut passer les Héaux-de-Bréhat avant la renverse.
Pourtant, ce matin, c'est "british breakfast". Peut-être un peu de nostalgie ou encore une de ces
super-idées de cet équipage décidément "top". Le port ressemble à un lac et la lumière est très belle. Il est temps de se préparer pour le départ. On a eu la météo du CROSS à 7h45 en VHF relayée par la station de Bodic." Est 4-5 avec rafales, beau temps."
Que demander de mieux?
A 9h, le moteur tourne. Jean-Pierre et Dominique sont les premiers à la manoeuvre. Comme tous les matins depuis douze jours au moment de l'appareillage, il fait très beau avec une vraie impression estivale.
La sortie est différente de l'entrée hier avec des lumières plus vives. Nous avons le courant contre nous jusqu'à Mean Ruz et après on le prendra dans sa totalité quand
on aura débordé les Sept Iles. Tout dessus pour un premier bord au près tribord amure. On envoie prestement la toile au pied du phare et c'est parti !
On est bien rôdé maintenant et les manoeuvres se font rapidement. Les filles prennent le premier quart de barre. Sur la table à cartes, je fais une estimation de notre ETA pour les Héaux, ça va être juste. Tout va dépendre des bascules de vent s'il
y en a. Après ce sera un peu "galère"avec pas mal de courant dans le nez car on a quand même presque 80 de coeff. Malgré la situation de vent contre courant, il n'y a pas pour l'instant de clapot gênant à négocier à la barre. Chadburn passe en douceur sans problème.
Hélène a vraiment fait de gros progrès dans sa tenue de barre au près. Maintenant, elle a les bons repères et les bonnes sensations, de même pour la conduite des virements de bord qui ne lui posent plus de problème. Eh oui, une telle croisière, c'est fait aussi un peu pour apprendre...On part tribord amure et après on ira chercher le plus gros du courant le long de la côte entre les Héaux et l'entrée de Perros-Guirec. Devant Port-Blanc, on aperçoit un gros vieux gréement et on essaie de faire comme avec la bisquine de Cancale hier: couper sa route pour prendre des photos. Il va aussi vite que nous mais il "pointe" nettement moins bien. On monte donc au-dessus de lui pour abattre ensuite afin
de "l'intercepter". Il est hollandais et magnifique av
ec toute sa toile du bas car les flèches ne sont pas hissées. Le vent est monté d'un cran depuis une demi-heure et nous avons réduit nous aussi. Nous sommes bâbord amures et lui tribord et pourtant il vire. Nous espérons ne
pas avoir été fautifs en pointant dessus. Nous verrons plus tard que non car après son virement, il fait route vers
l'entrée de Port-Blanc.
On aperçoit de plus en plus nettement la grande tour grise du phare des Héaux. Il nous reste un tout petit peu de courant favorable au moment où on envoie dans l'est après avoir fait un grand bord vers le large pour ne pas subir la renverse trop tôt et trop forte. En effet, la renverse se fait d'abord à la côte puis de plus en plus au large. De plus aux Héaux, il se forme un "raz"comme à tous les caps ou toutes les pointes en mer et le courant y est plus fort qu'ailleurs. Les passages de caps ou de pointes sont toujours des grands moments de mer. Ici, la roche est reine. Les "collègues" qui profitent du début du jusant nous croisent sous le vent.
En consultant la vitesse au GPS et en la comparant avec celle du speedo, on constate de toute évidence que la renverse est bien faite et prend de l'ampleur. Nous arrivons maintenant sur le restant des célèbres "marmites" des Héaux for
mées depuis six heures par le duel vent-courant. Elles sont encore très impressionnantes. Au nord de la tourelle de la Moisie, il y en a quelques-unes. Au niveau de la tourelle, il y a un chenal avec un bel alignement avec la chapelle St-Michel sur l'Ile de Bréhat qui permet de raccourcir la route, en évitant le plateau des Sirlots, avant d'entrer dans le chenal principal du Trieux. Pour l'instant, notre intention est de continuer, mais il faut l'avouer, notre vitesse de progression sur le fond diminue sérieusement pendant que celle sur l'e
au bat des records: 9,2nds. Chadburn rentre dans le courant et passe en force. Il devient évident qu'on ne va pas pouvoir passer la tourelle de la Horaine sur ce bord. Si ça pouvait se faire, on aurait la clef d'entrée pour la baie de St-Brieuc. Mais on en est pas là.
Pour le savoir, on essaie un contre-bord vers le large et là, on est tout de suite renseigné. Avec le courant qui augmente, on repart vers... l'ouest !!
Il faut prendre une décision parce que c'est maintenant évident qu'ON ne nous laissera pas passer...
Après une bonne heure et demie de lu
tte contre le courant, on va en faire notre allié. Je prends la décision de rentrer dans le Trieux. Donc, on abat un peu, le courant fera le reste puisque maintenant il nous prend légèrement de côté. En "bacant" de la sorte (c'est la même action qu'avec une petite embarcation en rivière quand on veut traverser et qu'il y a beaucoup de courant), on arrive aux Sirlots qui est la première latérale tribord du chenal. On est rentré. Ouf !!
Le phare du Paon sur l'extrémité nord de Bréhat, défile lentement sur notre bâbord puisqu'on a toujours le courant dans le nez mais ici, il est moins fort. On se retrouve vent de travers, bateau à plat et on a tout le temps
devant nous. Où allons nous nous poser ?
J'opte pour le mouillage de la Chambre dans le chenal du Ferlas. Ce serait un endroit possible pour prendre une décision pour la fin de l'après-midi. Mais celui-ci est un peu ouvert à l'est, donc, peu abrité aujourd'hui. On verra bien. Et puis, on trouvera sûrement autre chose, ce n'est pas ce qui manque dans le coin
Le phare de la Croix se rapproche et sera bientôt dans notre sillage. Devant sur bâbord, on entr
evoit le petit port de Loguivy de la Mer à gauche du phare. Celui-ci a d'ailleurs une particularité ( le phare du Paon est semblable depuis peu), il est blanc du côté du large et couleur pierre du côté du rivage). Il nous reste une partie du chenal du Ferlas à faire et on
est arrivé. A terre, sur tribord, sur la pointe de l'Arcouest, le parking des touristes qui visitent Bréhat. Une fois dans le chenal, il y a un gros os, c'est notre "copain", le courant. Dans ce chenal étroit, "il" ne rigole pas, il est trop fort le bougre et ne va pas laisser passer ces "puristes" qui avaient envisager de le remonter à la voile..."Non, mais
alors !!!"
A l'endroit le plus étroit du chenal, près de la tourelle de Trebeyou, un peu au-dessus de R
ompa, on est obligé de capituler. Depuis dix minutes, on y tire des bords carrés, c'est à dire que le bateau ne progresse plus au vent. Donc.............Moteur, après avoir enroulé le génois. Eh bien, on va aller voir comment c'est, du côté de la Chambre. "Tiens, le Renard est là !"Il est au mouillage, devant Port-Clos, le port de Bréhat. On continue vers le mouillage de l
a Chambre. Quand on y arrive, c'est pour constater que le plan d'eau est barré par une ligne de bouées. Donc, mouillage interdit !
On va donc prendre une autre option: Dans le sud du Kerpont, je vois un trou d'eau où il y a déjà du monde. En particulier la bisquine de Cancale. Décidément ! Allez, en route pour le Kerpont. C'est la première fois que j'envisage d'aller mouiller dans cet endroit. Je ne le connais pas et en y arrivant tout me parait très bien. On fait d'abord un petit tour d'observation en passant derrière la bisquine pour finalement venir poser l'ancre face à la rampe du canot de sauvetag
e.
On est très bien là et on s'installe. L'objectif est bien sûr d'y passer la nuit. On n'envisage d'aller à terre sur l'île mais après avoir vu la quantité impressionnante de touristes qui y sont déjà, la discussion penche vers le non. Hélène y serait bien aller, mais il fallait monter et gonfler notre grande annexe. Alors.... Oh, ce n'est pa
s du tout de la crânerie, ni de la fierté mal placée mais tout simplement une certaine logique. Naviguer en voilier, c'est aussi profiter pleinement de certains endroits qui sont peu accessibles par d'autres personnes. Bréhat, c'est mieux d'en profiter au début de la saison quand les mimosas et les agapanthes sont en fleurs et après la saison quand les hortensias multiplient leurs différentes couleurs. En attendant la fin de l'après-midi, on
s'organise une dégustation de bières anglaises en terrasse. Hélène en avait acheté un certain nombre à Penzance pour les consommer sur le bateau. Le moment est venu de le faire. Grand moment ! Petit à petit, la zone de mouillage se remplit. Pendant tout ce temps, le flot est en route et le vent est complètement tombé. Vers 19h30, le vent s'installe mais de secteur ouest et arrose de plus en plus fort le mouillage. Le courant généré, par le flot descend du Kerpont en augmentant si bien que cet endroit fort sympathique à l'étale de basse mer devient un peu désagréable. Le bateau tire de plus en plus fort sur sa ligne de mouillage. Un bateau des Glénans qui était arrivé sur le mouillage en fin d'après-midi, se retrouve seulement à quelques mètres de notre arrière. Tout ça ne me plait guère pour une dernière nuit au mouillage. Les rafales de vent sont de plus en plus puissantes. Je n'aime pas ce genre de situation pour l'équipage, pour le bateau et pour moi-même. Que fait-on ?
Je décide de partir et de remonter sur Lézardrieux. Seulement voilà, on est sur la montante donc, dans le Ferlas, on va être contre le courant avant de l'avoir pour nous après dans le Trieux. A remonter l'ancre... Il est 20h30 et le guindeau électrique fait son travail. En arrivant dans le Ferlas, Jean-Pierre qui avait certainement réfléchi à la situation depuis que je l'avais exposée à tout l'équipage me suggère d'aller à Saint-Quay-Portrieux. Le vent est avec nous, il est ouest force 3, le courant l'est aussi, dans 2 heures si tout se passe
bien on y sera. J'avais envisagé, ce matin, ce port dans les escales possibles de la nuit, mais, je n'aime pas y aller. Vous savez très bien pourquoi vous qui lisez ce blog
depuis le début. Mais ce soir, cette solution me parait acceptable. Donc, à envoyer la toile et cap sur la sortie du Ferlas et en route pour St-Quay. Nos dernières photos seront celles de la tourelle des Charpentiers et celle du phare de Lost-Pic à la sortie de Paimpol. Une heure et demie plus tard, le vent va nous abandonner et nous contraindre de finir au moteur pour les dernières minutes.
22h15: On entre au moteur dans le port. Le bateau est prêt et rangé. On repère une place possible au ponton visiteurs mais après essai, elle se révèle trop courte. A cet instant, une personne de l'accueil vient à notre rencontre et nous propose une place sur un catway. Jean-Pierre souhaite faire la manoeuvre, mais nous sommes très mal guidés par la personne de l'accueil si bien que nous nous trouvons subitement dans une situation désagréable. Finalement, tout rentrera dans l'ordre...Il va être bientôt l'heure du ...diner.
Bonne nuit à toutes et à tous et à demain pour la dernière étape de ce séjour.
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